11 janvier 2019

Darwin’s Test

Pour une fois, je vais vous parler d'un jeu dont la VO est française, ce qui est suffisamment rare pour être signalé !

Avant tout

Avant de commencer, je voudrais aborder un point important. Ce jeu a été développé par une seule personne en l'espace d'un an. Il faut savoir que développer un jeu est très difficile et qu'arriver au bout d'un projet est déjà une chose rare en soit. Aboutir à un telle finition en seulement une année est donc très impressionnant.

Ceci étant dit, il est très important pour moi d'essayer d'être le plus objectif possible lorsque je publie un article et j'ai plusieurs fois écris que je ne faisais pas de différence entre un jeu indépendant et un jeu "triple A". Dans cette optique, l'histoire d'un projet ne doit pas nous intéresser car c'est avant tout le résultat qui compte lorsqu'on découvre un jeu que l'on a acheté.

Si je tenais à préciser ceci, c'est parce que je ne compte pas atténuer mes propos lors de cette critique mais que j'ai malgré tout un profond respect pour le travail réalisé pour ce jeu. Il me semble très important de faire la différence entre un jeu qui est mauvais parce qu'il a été créé pour faire de l'argent et un projet qui a été poussé par la passion mais qui est raté faute de moyens. Il me semble que nous sommes ici dans le second cas.

Le début du jeu

Le jeu commence par quelques salles d'introductions plutôt sympathiques. L'univers est plutôt classique mais intriguant et l'ambiance est bonne. Je voudrais d'ailleurs souligner la bonne qualité des doublages. Le jeu comprend beaucoup de dialogues et ils sont intégralement en français, ce qui est suffisamment rare pour être signalé !

Pour présenter rapidement le jeu : on y incarne un homme amnésique devant effectuer des tests guidés par un mystérieux scientifique qui nous observe à distance. On évolue dans des salles remplies de cubes, de plaques mouvantes et d'interrupteurs. Bref, cela ressemble fortement à Portal et à tous ses clones.

Après avoir appris les bases, j'avais donc hâte d'être plongé dans des salles plus complexes ou de découvrir ce qui allait faire l'originalité de Darwin's Test... Malheureusement, ce n'est pas arrivé et mon intérêt pour le jeu n'a jamais réellement décollé. Pour comprendre pourquoi, j'ai tenté d'analyser dans cet article tous les points qui m'ont posés soucis. Ça va être un peu long mais il est parfois intéressant de réfléchir sur ce qui n'a pas fonctionné. Cela permet également de mieux apprécier les jeux qui parviennent à offrir une expérience réussie.

Les énigmes

Les énigmes sont correctes et j'ai passé un agréable moment à les résoudre. Cependant, elles possèdent 2 soucis majeurs :

Le premier et le plus gros soucis, c'est que les mécaniques sont très basiques. Lorsque je jouais, je me suis fait la réflexion que ça ressemblait un peu à Portal mais sans les portails... Et je pense que c'est un assez bon résumé. On dispose de cubes, de rayons lasers à rediriger, de plateformes mouvantes, de plaques de pressions... Tous ces éléments sont assez classiques et je pense qu'il manque LA mécanique du jeu, le gimmick qui pourrait lui donner son originalité.

Le second soucis, c'est que les énigmes sont très linéaires. Ce n'est pas un gros problème mais c'est un peu décevant pour un jeu de réflexion. On ne peut généralement accéder qu'à un seul élément à la fois et cela rend la résolution très simple. Il y a beaucoup de salles qui doivent être résolues de la manière la suivante : on dispose d'un cube au départ, celui-ci nous permet d'accéder à un second. Ces 2 cubes ensemble nous donnent accès à un 3e et ainsi de suite.

Certaines plaques possèdent même un numéro qui indique le nombre de cubes à récolter, ce qui rend l'ordre encore plus évident. Il y a bien quelques fois où il nous faudra effectuer quelques allers retours mais dans ces cas là, ce sont les phases de plateformes qui nous poseront des difficultés et non pas la réflexion, ce qui m'amène au point suivant…

Les phases d'action

La majeur partie de la difficulté dans Darwin's Test provient des phases de plateformes. Certaines salles sont en effet des tests d'habileté dans lesquelles il faudra éviter des lasers, des tourelles ou des chutes dans le vide. Souvent, les salles vont combiner les 2 types de gameplay et il faudra franchir des obstacles pour aller chercher une caisse ou traverser un couloir. Malheureusement, ce n'est pas toujours réussi et ces séquence apportent beaucoup de frustration.

Généralement, je pense qu'un jeu de plateforme en vue à la première personnes est une idée assez dangereuse car cela rend très compliqué la perception de notre position précise. Hors, dans Darwin's Test, on nous demandera souvent de progresser sur des plateformes assez petites et d'effectuer des sauts sur celles-ci pour éviter des lasers ! Je ne suis pas certain que cette idée puisse très bien fonctionner et il serait intéressant de savoir si une vue à la 3e personne aurait pu améliorer les choses. En tout cas, les sauts sur des plateformes mouvantes sont toujours un peu délicats, même dans un jeu en 2D et ici ils ne sont pas intuitifs du tout.

Cette vue à la première personne pose également des problèmes de visibilité car il nous est plusieurs fois demandé de regarder dans plusieurs directions à la fois. Par exemple, il faudra traverser un précipice en utilisant des plateformes mouvantes tout utilisant une caisse comme bouclier pour bloquer les tirs d'une tourelle. Mais comment faire pour regarder où l'on va lorsqu'on doit faire face à la tourelle qui est placé sur le côté ? Mais il y a pire et la salle finale m'a fait éclater de rire lorsque je me suis rendu compte que je devais éviter des lasers venant de 2 directions complètement opposées. Il ne reste plus qu'à apprendre les patterns par coeur dans ce cas.

Heureusement, il y a des checkpoints assez fréquents et on ne doit pas tout refaire en cas d'échec car les différentes caisses et interrupteurs restent en place en cas de mort. C'est parfois bien… c'est parfois une plaie. En effet, on doit très souvent transporter une caisse à l'autre bout du niveau ou l'utiliser comme bouclier. Si on échappe cette caisse sur une plateforme en mourant, elle restera sur place. Il n'y aura donc plus qu'à réinitialiser le niveau ou bien tenter d'aller la récupérer en essayant d'esquiver les tirs à la manière de Neo.

Les caisses

J'ai décidé de consacrer un paragraphe entier pour les caisses car on passe beaucoup de temps à en transporter et pourtant, cette simple action ruine une bonne partie du jeu.

Premièrement, il y a un problème tout simple : lorsqu'on transporte une caisse, celle-ci s'affiche en transparence devant nous. Même si on peut toujours voir ce qui se passe, il est assez pénible de devoir traverser des niveaux entiers avec un gros cube devant le nez. Ce n'est pas grave lors des phases de réflexion mais lors des séquences de plateformes c'est plus problématique. C'est d'autant plus dommage que, bien souvent, le fait de devoir amener une caisse à la fin du niveau ne change rien au gameplay. Il aurait été plus agréable de pouvoir s'en passer et qu'une porte déjà ouverte nous attende au lieu de devoir actionner une plaque de pression.

Il y a également de très gros soucis liés à la physique du jeu. Il va ainsi arriver un moment où il faudra empiler des caisses et ce n'est pas une expérience qui est plaisante. On voit très mal l'endroit où on est entrain de la poser et celles-ci ont tendance à tomber assez facilement. Il est donc difficile d'être précis et on a toujours un peu peur que tout s'écroule comme un château de cartes.

Autre problème, lorsque l'on porte une caisse, celle ci a une existence dans le monde. Elle va donc entrer en collision avec tout ce qui est possible : murs, autre caisses, plateformes. Il faut alors prendre l'habitude d'être très prudent et d'éviter soigneusement les obstacles, sous peine de voir notre caisse tomber dans le vide, nous obligeant à retourner en arrière. Ça n'a l'air de rien mais vu que les niveaux sont très verticaux et pas toujours très spacieux, il n'est pas rare d'échapper l'objet que l'on tiens en main alors qu'on est occupé à tenter de garder notre équilibre.

On peut voir ici qu'un problème en apparence très simple comme amener une caisse d'un point A à un point B n'est pas si évident à gérer dans un jeu vidéo. Une mécanique qui nous paraîtra intuitive est toujours le fruit de longs réglages. Par curiosité, je suis allé rejouer à Portal et à Talos Principle pour comprendre comment ces deux jeux avaient résolus cette question. Portal dispose de très gros cubes qui bloquent notre vue mais il ne nous demande jamais d'effectuer des trajets compliqués avec ceux-ci. Il est également possible de transporter les cubes d'une autre façon, avec les portails. Enfin, les cubes sont très gros et ont une masse suffisante pour être stables (et il est possible que la physique du jeu triche un peu).

The Talos Principle contourne habillement le problème : tous les objets que l'on transporte sont placés en bas de l'écran, comme une arme dans un FPS. Tant qu'ils sont dans notre main, ils n'interagissement pas avec le jeu. Lorsque l'on peut poser un objet, une copie en fil de fer apparaît à l'endroit que l'on vise, nous permettant de le déposer avec précision.

Les idées originales

Un bon point pour Darwin's Test : le gameplay est plutôt varié. On ne se contente pas d’enchaîner les salles de test. Il y a très fréquemment des dialogues permettant de faire progresser l'histoire, les salles plateformes et réflexion s’enchaînent ou se mélangent et on a également le droit à quelques salles un peu particulières.

Ce n'est pas parfait hélas mais elles ont le mérite d'apporter des surprises et d'avoir maintenu en éveil ma curiosité. Ainsi, on aura le droit à des salles "QCM" dont l'idée est intéressante même si je ne me suis pas senti très impliqué par propositions dans le sens où l'on doit souvent choisir entre la peste et le choléra. Il y a également des salles jouant avec la gravité vers la fin. L'idée est sympathique mais heureusement que cela n'a pas duré plus longtemps car j'ai trouvé que c'était un peu désagréable. Heureusement que le jeu n'est pas en VR car je pense que j'aurais très vite été malade.

Sinon, il y a également plusieurs salles basées sur le son. Vous risquez donc d'être bloqué si vous avez des problèmes d'audition. Je n'en ai pas personnellement mais j'ai eu beaucoup de difficultés à terminer ces tests. J'ai mis longtemps à comprendre pourquoi mais il me semble que c'est parce que le jeu nous téléporte lorsque l'on se trompe de chemin, ce qui augmenterai encore plus la sensation de désorientation. Je n'ai pas vérifié cette théorie mais en tout cas je n'ai pas compris le trajet que j'ai effectué pour passer. Je n'ai pas vraiment apprécié ces moments.

Pour terminer

Au final, cette article était surement un peu trop long et ressemble plus à une analyse qu'à une review mais j'avais beaucoup de choses à en dire. C'est un peu pour cette raison que j'ai créé ce blog, dénicher des jeux peu connus mais intéressants plutôt que de publier une article de plus sur le dernier AAA à la mode.

Je voudrais terminer en disant que j'ai tout de même passé un bon moment dans l'ensemble. La réalisation est bonne et mis à part les phases un peu rageantes, on progresse de façon fluide et on n'est jamais bloqué très longtemps. Les nouvelles salles s’enchaînent donc régulièrement, ponctuées par des dialogues fréquents et, si l'histoire n'est pas forcément très originale, on la découvre avec plaisir. Je trouve que ce jeu vaut largement The Turing Test par exemple même si il est moins travaillé et qu'il ne possède pas des graphismes aussi bons.

Le côté un peu amateur a aussi son charme et il y a toujours un certain plaisir à tester un jeu un peu "cassé". Les lasers nous font faire des bons de 2 mètres et j'ai parfois réussi à prendre un raccourci involontaire avec ce saut imprévu. Je me suis aussi retrouvé bloqué dans un couloir parce que qu'avais échappé une caisse et qu'un laser m'empêchait de le récupérer. Il m'est aussi arrivé de perdre une caisses parce qu'elle avait été catapultée par un tapis roulant par dessus un mur d'énergie. Bref, tout ça peut être vraiment fun parfois !

Il y a également une fonctionnalité permettant de rejouer les niveaux individuellement et d'avoir accès à un classement général. J'aime toujours autant l'aspect speedrun et j'y ai donc passé un certain temps. Certains niveaux n'ont pas d’intérêt étant donné qu'il y a beaucoup de dialogues mais pour les autres, j'ai pris plaisir à essayer d'optimiser mes routes. Le challenge étant d'autant plus intéressant qu'il y avait tout à découvrir vu le faible nombre de joueurs et je vous met au défi de battre mes temps si vous pensez pouvoir y arriver ! ;-)

Conclusion

Darwin's Test possède un air de déjà vu et ne vous occupera pas bien plus de 4 heures. Il propose un design parfois agaçant mais également quelques idées originales.

Les jeux de plateformes puzzles à la première personne sont assez rares, vous pouvez donc lui donner une chance si vous êtes prêt à lui pardonner ses défauts.

3 commentaires pour “Darwin’s Test

  1. H
    hixeN` dit :

    Ton test est vraiment constructif, ça se sent qu'il a été fait avec beaucoup de bienveillance, tout en essayant de rester le plus objectif possible : "Je te tire mon chapeau" :)

  2. S
    Skritz dit :

    Merci bien, c'est ce que j'ai essayé de faire.

    Au passage, le créateur du jeu a une chaine youtube : https://www.youtube.com/channel/UCbr-bmgXMzCYk4yfZlFh_rA/videos
    C'est intéressant car il parle de sa méthode de travail et on apprend des choses sur l'envers du décors, notamment sur le coût des traductions, les ventes du jeu, les taxes, etc.

  3. H
    hixeN` dit :

    Ça marche !

    J'irai faire un tour et merci pour le lien.

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